La claustrophobie : analyse d’un espace qui se referme

La claustrophobie est souvent abordée sous l’angle médical ou comportemental. Elle désigne cette peur irrationnelle et envahissante des lieux clos, de tout ce qui peut donner l’impression d’être enfermé, piégé, sans issue. Mais derrière ce symptôme, parfois très invalidant au quotidien, se cache souvent une dimension bien plus intime : celle d’un espace psychique en tension, envahi, comprimé. Que nous dit la claustrophobie, si on l’écoute au-delà de sa manifestation physique ?
Un espace intérieur saturé
Dans une lecture analytique, le corps parle pour l’inconscient. Ce sentiment d’étouffement n’est pas toujours lié à un lieu précis, mais à une impossibilité intérieure de respirer psychiquement. Le sujet claustrophobe n’a pas d’espace à lui, ou du moins il ne le ressent pas. Il peut vivre dans un rapport étroit avec l’Autre, réel ou symbolique : un parent envahissant, un environnement affectif trop fusionnel, une histoire où le désir personnel n’a jamais pu se déployer sans peur de trahir.
Le lieu clos comme théâtre du passé
Pour certains, l’espace clos rejoue une scène ancienne, souvent oubliée ou refoulée. Il peut s’agir d’une séparation mal vécue, d’un moment d’abandon ou de peur infantile. L’angoisse, en apparence liée à l’environnement physique, se réactive face à une sensation archaïque de perte de contrôle, d’enfermement symbolique, ou de non-existence. Le lieu devient alors le support d’une mémoire affective non élaborée, qui se répète à travers le corps.
Une défense contre l’effondrement
Paradoxalement, la claustrophobie peut être une tentative de défense, une manière de rester vivant face à un effondrement plus profond. L’angoisse surgit avant que le vide ne soit perçu consciemment. Mieux vaut paniquer dans un ascenseur que sentir l’abîme intérieur d’un moi en danger. Le symptôme prend alors le rôle de garde-fou : il devient l’expression d’un conflit psychique, entre désir de séparation et crainte d’annihilation.
Vers un espace plus habitable
Sortir de la claustrophobie ne signifie pas seulement réussir à prendre l’ascenseur ou monter dans un avion. Cela suppose un travail de réappropriation de son espace psychique. Cela peut passer par une parole mise en circulation, un travail analytique, une mise en lien avec les origines de cette angoisse. Ce n’est pas l’espace extérieur qu’il faut élargir, mais l’espace intérieur. Celui dans lequel le sujet peut respirer, penser, désirer, sans se sentir coupable ou menacé. L’espace où il peut exister pour lui, et non seulement pour l’autre.