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Puis-je vivre sans l'amour de mon enfant?
De plus en plus de parents sont en demande d’aide quand leurs enfants les rejettent. La relation parent/enfant traverse une crise qui peut se figer dans une incompréhension profonde. Celle-ci fait souffrir parents et enfants. Si ce rejet est un processus classique du développement psychique de l’enfant, l’expression par le parent de la douleur associée est beaucoup plus contemporaine...
Pourquoi j’ai le sentiment de tout perdre quand je perds son amour ?
Aujourd’hui, la famille fragilisée par les divorces et les séparations a modelé de nouveaux modes de rapports entre les parents et les enfants. Après une séparation par exemple, l’enfant se trouve investi de manière nouvelle : compagnon du quotidien, substitut affectif, souvenir d’une relation passée. Il quitte la place traditionnelle de l’enfant maintenu à l’extérieur du couple parental et du registre des adultes. Beaucoup d’enfants deviennent ainsi les confidents voire les témoins de nos souffrances de parents. La séparation des rôles et responsabilités enfant/parent vole en éclats. Nous demandons à nos enfants de nous témoigner l’amour dont nous manquons dans nos rapports quotidiens.
La rupture, promesse d’une relation nouvelle
Avant l’adolescence, l’enfant s’accommode de cette situation qu’il interprète comme une preuve d’amour parental. Quand l’adolescent découvre l’étendue de la palette des relations qui s’offre à lui et qu’il se construit un nouvel environnement affectif (une tribu, des copains, des amours), il rejette cette proximité devenue encombrante car associée à l’enfance. Tout processus adolescent est gouverné par une certaine violence : cris, insultes, critiques incessantes apparaissent. Parents, surpris de ce changement brutal d’attitude, nous peinons à comprendre les enjeux de cette crise. Notre tendance est de manifester notre étonnement, rappelant ce faisant, le souvenir de la situation relationnelle antérieure dont l’adolescent tente de se débarrasser.
Sauvegarder le lien, une question de places
L’amélioration de la situation ne peut venir que d’un réajustement des places de chacun. Ainsi, il est important de reconnaître le droit de l’adolescent à son intimité affective et corporelle. Il a grandi et dispose à présent d’une vie psychique différenciée de celle de ses parents et des autres adultes. Changer pour coller à l’image de parent idéal que nous pensons entendre de la bouche de notre adolescent n’aurait qu’un effet délétère. L’adolescent n’y verrait qu’une tentative pour l’attirer de nouveau (séduction) dans le schéma relationnel infantile auquel il tente de mettre fin. Ainsi, il est plus efficace de se repositionner comme parents en investissant notre énergie psychique dans la création de nouveaux liens affectifs voire de nouvelles relations, laissant de côté notre adolescent. L’expression de notre amour parental prend alors la forme d’une liberté accrue accordée à l’adolescent et permet, à chacun des protagonistes, de retourner à une place épanouissante.
L’amour des enfants n’est pas inconditionnel
Hors les structures mono-parentales et les séparations, les situations de désamour filial sont très fréquentes. Nous sommes témoins au quotidien de ce que nos enfants n’ont pas les mêmes attachements à leurs deux parents, voire entre leurs parents et leurs grands-parents. Chaque parent (référent) est en général consulté sur des sujets particuliers en rapport avec les rôles psychiques et le genre qu’il occupe pour l’enfant. Il serait compliqué de demander à nos adolescents de faire l’abstraction de la dimension sexuée des rapports que nous entretenons avec eux. Leur amour différent pour chacun de leurs parents s’entend comme l’expression de leur inscription dans la sexualité et dans le genre. S’ils aiment leurs deux parents avec autant d’intensité, les expressions diversifiées de leur amour reflètent alors les différences qui existent entre père et mère, parents et grands-parents.