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Potentiels et limites de l'hypnose
Si Freud parlait de l’hypnose comme d’une énigme, il est vrai que cette technique, présente dans de très nombreuses civilisations depuis des siècles, suscite toujours l’enthousiasme de certains, comme la suspicion chez d’autres.
Une efficacité scientifiquement prouvée
Les progrès réalisés par la science en matière d’imagerie médicale ont permis d’observer l’activité du cerveau en état hypnotique et de constater les effets de la suggestion du thérapeute sur son patient.
Une expérience a ainsi démontré que les zones corticales activées par les suggestions étaient identiques à celles mises en œuvre au cours de l’action : en d’autres termes, pour l’activité cérébrale, se concentrer sur une acte équivaut à le réaliser.
Cette démonstration explique notamment l’efficacité de l’hypnose dans le traitement de la douleur chronique : en suggérant au patient qu’il souffre moins, l’activité des zones corticales impliquées dans le traitement de la douleur diminue effectivement.
Une porte vers l’inconscient
Cette possibilité représente sans doute le potentiel le plus important de l’hypnose. Encore fallait-il la prouver. C’est ce que le chercheur en neuroscience clinique Amir Raz, de l’université de Columbia a réalisé en 2005 en plaçant en état d’hypnose des patients soumis à l’expérience de l’effet Stroop.
Elle consiste à demander aux sujets de citer la couleur d’une série de mots désignant des couleurs, les termes étant systématiquement écrits dans une teinte différente : par exemple, lorsque le sujet voit le mot ‘VERT’, il doit répondre ‘rouge’. A l’état de conscience, il fut prouvé que les sujets parviennent à réaliser l’exercice mais nécessitent davantage de temps que dans le cas où le mot présenté n’est pas une couleur. Cette expérience prouve la primauté de l’acte de lecture, mécanisme intellectuel réflexe.
Amir Ratz proposa le même protocole à des sujets placés auparavant en état hypnotique et auxquels il fut suggéré que les termes présentés étaient sans signification. Leurs réponses furent instantanées, déjouant ainsi l’effet Stroop, mécanisme pourtant impossible à supprimer en état de conscience. Il prouva donc que l’état hypnotique permet réellement d’accéder à un état différent de la conscience, autrement dit, à l’inconscient.
Les limites psychologiques
Si l’hypnose permet d’accéder à l’inconscient (cet inconscient est-il le même que celui des psychanalystes ?), il ne le maîtrise pas pour autant. Et c’est bien l’une de ses plus flagrantes limites.
L’hypnose agit en dissociant un comportement jugé inadéquat ou problématique par le patient, du symptôme. Par exemple, dans le cas d’un fumeur, l’hypnotiseur dissociera le trouble addictif de l’acte de fumer. Il ne travaille donc pas sur la cause de ce comportement et se trouve donc limité par les processus de substitution de symptômes.
Dans notre exemple, l’acte de fumer peut représenter la réponse de l’individu à un stress, celui-ci étant donc l’origine de l’addiction. Si l’hypnose permet au patient l’arrêt de la cigarette, elle ne supprime en aucun cas l’origine du trouble. Le sujet pourra ainsi développer une nouvelle addiction (alimentaire par exemple) pour répondre au stress toujours présent.
Les phénomènes d’entrave
Contrairement à certaines idées reçues, l’état hypnotique ne permet pas au thérapeute de contraindre le sujet à réaliser des actes contre sa volonté. Cette limite, bien qu’éthiquement valable, représente un frein.
Il existe en effet certaines pathologies ou comportements qui répondent à un besoin profond de l’individu, besoin parfois inconscient et donc ignoré. Dans ces cas, le patient aura beau exprimer son souhait de changer ou de se débarrasser d’un symptôme, l’hypnose restera sans effet.
Les troubles de douleurs chroniques sont particulièrement enclins à répondre à ce genre de problématiques. Les symptômes douloureux répondent parfois à des enjeux inconscients complexes que l’hypnose ne sera pas en mesure de résoudre.
L’effet placebo
Certaines critiques émises à l’encontre de l’hypnose la comparent à une sorte de ‘super’ effet placebo, dont l’efficacité n’est plus à démontrer. En résumé, les patients guériraient car ils sont convaincus de guérir.