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Malaise dans la police nationale : le livre à paraître chez Eyrolles
Nadège Guidou, psychologue du travail et auteure de nombreux articles pour psychologie.fr publiera prochainement son premier livre. Un ouvrage accessible et complet dans lequel elle explique comment et pourquoi la police nationale est devenue la profession qui compte le plus grand nombre de suicides.
La réalité quotidienne des policiers
Dans la première partie de son livre, Nadège Guidou décrit fidèlement le quotidien des policiers en tenue. Posant ainsi les bases de ses analyses, elle lève le tabou du nombre de suicides (une moyenne d’un par semaine depuis 1995, soit plus du double du taux de suicide chez France Telecom) et dénonce le déni institutionnel mis en place par l’administration sous-couvert d’évitement d’un phénomène de contagion.
Revenant sur l’augmentation des actes de violence commis à l’encontre des policiers, l’auteure distingue agressions physiques et verbales, et rappelle que tout sentiment est nécessairement vrai. Ainsi, immergés dans un environnement perçu et vécu comme hostile, les policiers développent une hypervigilance et un culte de la virilité destinés à faire face aux dangers multiples et aux risques de mort.
La violence, c’est aussi l’exposition à la souffrance d’autrui : la détresse humaine, la saleté, les ordures, les meurtres, l’Homme en état de manque, la maladie, la proximité avec les excréments et les déchets humains…. Chaque jour, les policiers sont confrontés à ce que l’Homme peut générer de plus sale et de plus noir, quelles sont les conséquences d’une telle proximité sur le psychisme des policiers ? C’est ce qu’explique Nadège Guidou.
Loin d’être autonome sur le terrain, le policer est aussi un professionnel inscrit au cœur d’une administration gigantesque et dont l’organisation n’est pas pensée pour protéger la santé des agents : des temps de travail qui ne respectent pas les rythmes biologiques et sociaux, une culture du chiffre qui met à mal les valeurs du travail bien fait ou encore une hiérarchie qui n’anticipe pas les phénomènes d’épuisement professionnel ; instrumentalise la figure du policiers à des fins politiques et dont les pratiques participent à une perte du sens du travail.
Les mécanismes de défense et de préservation de la santé
Au travers d’exemples concrets et de nombreux témoignages de policiers, l’auteure explique les divers processus mis en œuvre consciemment ou non afin de poursuivre le travail et d’y survivre (moralement, psychologiquement, socialement et physiquement puisqu’être policier, c’est accepter de donner jusqu’à sa vie pour son métier). Des carrières horizontales en réponse à l’envoi massif de jeunes policiers dans les secteurs les plus difficiles, à la politique ‘du parapluie’ face à une organisation qui exige des policiers qu’ils calquent leurs actes à un éventail de procédures qui tentent de contenir la réalité, en passant par l’intériorisation de représentations de certaines populations afin de se protéger de l’imprévisibilité de leur métier, tous les mécanismes mis en place pour poursuivre le travail sont repérés et explicités.
Les diverses violences décrites en première partie sont reprises et traitées du point de vue de leurs résonances sur le psychisme individuel et collectif : les processus liés à la souffrance éthique (fait de réaliser, plus ou moins consciemment, un acte allant à l’encontre de son sens moral), l’anesthésie émotionnelle, l’intériorisation d’une culture de la virilité et la mise au banc des caractéristiques rappelant la féminité (empathie, sensibilité, compréhension…).
Les contraintes liées à l’organisation
Bien que le travail quotidien des policiers soit difficile et dangereux, l’auteure démontre comment l’organisation de la police nationale participe au malaise au travers d’une vision de l’agent comme potentiellement défaillant (devant donc être contrôlé), et d’une administration fondée sur un modèle taylorien créant une frontière entre élaboration des politiques de sécurité (les hauts fonctionnaires) et application (les policiers de terrain).
En se coupant de leurs bases, les hauts fonctionnaires instaurent une distance qui engendre des conséquences nocives pour les agents. L’absence de reconnaissance et le déni de la réalité de travail se répercutent dans le quotidien par la formulation d’injonctions paradoxales et la perte d’autonomie, pourtant source de santé au travail.
En conclusion, Nadège Guidou présente un ensemble de 10 propositions destinées à améliorer le quotidien des agents : un livre vrai, sans concession ni langue de bois et qui se veut au plus près de la réalité des policiers.