Les gâteaux de ma maman
Quand ma mère se mettait en cuisine, toute la maisonnée profitait de cette atmosphère savoureuse qui venait chatouiller les papilles. Les odeurs qui s'échappaient de la cuisine constituaient un prélude aux plaisirs à venir...
Le rituel de la préparation
Il fallait attendre le week-end, jour de "repos" de ma mère, pour avoir droit à de bons desserts concoctés spécialement pour nous. Le rituel était solidement en place: marché le samedi matin et l'après-midi, si nous étions chanceux, et nous l'étions souvent, dessert maison. La grande question demeurait toujours de savoir s'il y en aurait assez pour l'appétit d'ogre de mes frères et de mon père. Nous venions nous en enquérir régulièrement, pour être sûr, au final, d'être bien servi en fonction de l'enthousiasme exprimé lors de la préparation.
Les desserts familiaux
Les îles flottantes étaient nos desserts préférés. Notre mère les réalisait à merveille. Cette petite île qui flottait dans nos coupelles, arrosée avec une abondance de crème anglaise amenait de la poésie à la tablée, par son nom et par sa forme, et la dégustation se réalisait dans un silence voué à la délectation. D'autres jours, notre mère nous cuisinait une tarte aux pommes. Elle étalait la pâte sur la table et laissait glisser son rouleau pour l'affiner. Elle prenait grand soin, ensuite, de la déplacer délicatement dans le moule à tarte sans qu'elle ne se brise. Parfois, je l'aidais à couper les morceaux de pomme et à les disposer correctement dans le moule. J'appréciais ces moments où je participais à la préparation... les saveurs de la dégustation n'en avait que plus de goût.
Ce qui se joue dans la cuisine
Une odeur que nous saisissons ou la vue d'un dessert qui nous a été familier, lorsque nous étions enfant, peuvent faire surgir en nous des moments de vie, des ressentis associés à ces instants de l'enfance. A l'instar de jouets entreprosés dans un grenier ou un placard pendant des années, la redécouverte de saveurs de l'enfance rouvrent des univers souvent lointains, parfois oubliés. L'atmosphère qui régnait lors des préparations culinaires, les habitudes de chacun dans la confection puis la ritualisation du repas (places occupées par les uns et les autres, discussions engagées, non dits...). Désormais adultes, rien ne nous empêche de revisiter ces histoires, de s'en imprégner, d'imaginer des scénarios différents à ce qui était douloureux (nous disposons d'outil et de connaissances que nous n'avions pas forcément à cette époque) tout en profitant des moments agréables, bienveillants ou apaisants.