Difficulté de lecture : 4 / 5
Le stade anal
En 1905, Freud décrit l'enfant comme un "pervers polymorphe". En effet, le développement psycho-sexuel de celui-ci visite différentes zones corporelles non liées directement à la sexualité. L'enfant trouve donc ses satisfactions sexuelles dans des stimulations sans rapport à la zone génitale. Or la perversion est définie par la psychanalyse (différent du sens commun) comme une déviation par rapport à la satisfaction sexuelle génitale.
La deuxième phase du développement
Alors que l'enfant vit sous le primat de la zone orale, une question va surgir dans son esprit. Celle de savoir ce que deviennent les aliments ingérés et les objets incorporés (fantasme). Le modèle physiologique de la digestion (surtout la représentation que l'enfant s'en fait à partir du discours parental) va servir de trame au passage d'une zone érogène à une autre : zone orale vers zone anale. Le stade anal suit le stade oral et forme la seconde phase du développement psychique de l'enfant. Il s'étend de 18 mois à 3 ans approximativement.
Propreté et contrôle
L"importance de la zone corporelle anale mais aussi des excréments est supportée par l'intérêt que les parents portent à la défécation de l'enfant (surtout au cours de l'apprentissage de la propreté). L'enfant découvre qu'il peut volontairement retenir et expulser ses fèces. Ce contrôle est corporellement possible quand l'enfant est capable de descendre trois marches d'escalier seul. Mais au-delà du simple contrôle sphinctérien, l'acquisition de propreté est un enjeu relationnel. L'enfant en tire une satisfaction qui est liée à la maîtrise. Par elle, l'enfant prend le contrôle sur son corps et découvre qu'il peut exprimer une individualité propre. De plus, cette phase anale est conjointe à la phase d'opposition avec laquelle elle partage des mécanismes. L'opposition est sur le plan psychique ce que le contrôle sphinctérien est sur le plan physique.
Agressivité et destructivité
Par ailleurs, nous pouvons voir chez l'enfant un intérêt pour ses excréments. Il arrive fréquemment qu'il joue avec, les triture voire nous les présente. L'excrément est pour lui une partie de son corps qu'il propose comme cadeau. C'est un support relationnel. Or, pour l'adulte l'excrément est frappé du sceau du dégoût. L'enfant découvre donc l'ambivalence (maintien psychique côte à côte de deux éléments opposés). En l'occurrence ici le cadeau et le dégoût. Si les fèces peuvent lui servir de vecteur pour heurter l'autre, l'enfant découvre qu'elles peuvent donc exprimer son agressivité. Ce stade est ainsi appelé "sadique anal".
L'analité
L'enfant a désormais étoffé la palette de ces investissements corporels et, ce faisant, la palette des pulsions auquel il a accès. Désormais, il a intégré les notions de propre et de sale qui sont des équivalents symbolique du bien et du mal. Il a aussi découvert qu'il pouvait maîtriser ses satisfactions et la relation à l'autre. Il découvre donc progressivement l'autonomie affective. Cette nouvelle organisation psychique complète et étoffe l'organisation orale précédente. Inconsciente, elle n'apparaîtra que rarement pure à l'âge adulte et jamais de façon évidente. Toutefois, elle est en jeu dans tous les instants de la vie quand un jugement de valeur est porté sur un évènement.
Elle se rencontre aussi dans tous les fonctionnements qui jouent sur la question de la rétention et l'expulsion (le jeu d'argent et l'avarice, l'amour et la haine, …). C'est encore elle qui agit inconsciemment quand nous rencontrons différents embarras digestifs face à des situations stressantes ou angoissantes. Par extension, le stade anal est derrière tous les états d'ambivalence affective et de doute. Inconsciemment ils sont des équivalents des questions d'autrefois lorsqu'il s'agissait de savoir si le moment était venu d'expulser ou de retenir pour satisfaire l'autre, notamment le parent.