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La dépendance aux jeux vidéo
A l’origine, l’association d’intérêt général e-enfance avait été créée pour protéger les enfants des pièges d’Internet, mais à ce jour, la majorité des appels concerne les jeux vidéo. Nombreux sont les parents qui s’inquiètent du temps que leurs enfants passent devant leur console.
Les dangers des jeux vidéo
Certains adolescents, particulièrement les garçons, peuvent rester des heures à jouer, enfermés dans leur chambre. Ils y passent des nuits entières, quitte à ne plus se nourrir, à ne plus sortir, à se couper de leur entourage familial et social.
Les parents ne parviennent plus à dialoguer et ne comprennent pas l’intérêt de leur enfant pour ces jeux. Ils tentent d’imposer des limites, interdisent parfois. Un conflit durable peut alors s’installer entre parents et enfant, chacun campant sur ses positions.
Dans les cas les plus extrêmes, les adolescents peuvent jouer jusqu’à quinze heures par jour. Le jeu vidéo devient alors une véritable drogue. Cette addiction doit être prise au sérieux : l’an passé, un jeune homme s’est donné la mort, refusant de quitter le monde virtuel dans lequel le jeu l’avait enfermé.
Quels sont ces jeux ?
Parmi les utilisations conduisant à l’addiction, on trouve les jeux vidéo en ligne tels que World of Warcraft, Guildwars, Dofus’, Second life…
S’agissant de jeux en réseau, l'utilisateur doit s’associer à d’autres pour atteindre l’objectif fixé ; il se trouve ainsi facilement intégré à un groupe, alors que cela peut s'avérer beaucoup plus difficile dans la réalité. Il est intéressant, à ce titre, de remarquer le vocabulaire employé pour désigner ces groupes : les joueurs parlent de "clan", un terme qui renforce bien le sentiment d’appartenance.
Les jeux se passent en temps réel. Autrement dit, le temps de la vie réelle est le même que celui du monde virtuel, un autre élément participant à la confusion. Beaucoup de joueurs chevronnés avouent qu'ils n'ont aucune idée de l'heure à laquelle ils débutent une partie, ni même de délai qu'ils passent à jouer. Arrêter le jeu est donc tout simplement impossible : il ne s'arrête pas, le joueur si. Comme au casino en quelque sorte, lorsque le jouer se retire de la table, il sait qu'un autre prendra sa place, et que la partie se poursuivra sans lui. À son retour, il devra reprendre le jeu en cours et s’adapter aux évolutions réalisées par d’autres. Le joueur sait donc que chaque minute passée dans le monde réel le prive du monde virtuel, de sorte qu’il est toujours confronté à un choix entre les deux.
Les personnages
L'adolescence, on le sait, est une période de mal-être, plus ou moins longue et intense, durant laquelle l'identité future se construit. Dans le jeu, ces difficultés disparaissent car l'individu devient un autre, il est libre d’être celui ou celle qu’il désire. Le monde virtuel lui permet de se construire le corps qu’il souhaite et de ne plus être soumis aux contraintes de la vie réelle. D’ailleurs, la plupart des joueurs disposent de plusieurs personnages et jonglent ainsi avec les identités, passant facilement de l’une à l’autre.
Dans notre société, l’image que l’on renvoie aux autres est devenue primordiale : il faut toujours être parfait ; porter les derniers vêtements à la mode ; être bâti comme les mannequins ou les stars, sous peine de se voir rejeter. Les créateurs de jeux vidéo ont particulièrement bien saisi cette problématique : lorsqu’une partie débute, la première chose demandée au joueur est de créer son personnage. Tout est adaptable, de la forme des yeux, à la couleur et la coupe des cheveux, jusqu’aux vêtements. Comme dans la vie réelle, chaque joueur devient unique, mais cette fois, en étant en accord avec sa propre image.
La reconnaissance
Les suicides sont la deuxième cause de mortalité chez les jeunes après l’alcool, c’est dire le mal être profond qu’ils ressentent dans une société qui ne les comprend pas et dans laquelle ils ne trouvent plus leur place. Beaucoup ont le sentiment, quels que soient les efforts qu’ils font ou feront, qu’ils ne seront jamais reconnus à leur juste valeur. Le travail n’est plus synonyme de récompenses. Le chômage, les licenciements, la crise marquent aussi les esprits des jeunes.
Dans ces jeux vidéo, les garçons appartiennent d’emblée à un clan, ils sont donc parfaitement intégrés. La reconnaissance est forte pour ceux qui passent des heures à jouer : ils gagnent des accessoires particuliers, des signes visibles aux yeux des autres joueurs qui montrent leur valeur. Les récompenses sont aussi présentes : ils accèdent à de nouvelles options de jeu, à de nouveaux lieux où se retrouvent les meilleurs joueurs...
L’incompréhension des parents
Les consultations thérapeutiques des joueurs dépendants révèlent très souvent un manque de communication dans la famille. Les parents sont totalement dépassés par la situation, ils ne comprennent pas comment il est possible de passer autant d’heures sur le même jeu, et n'entendent rien à son fonctionnement.
L’écart entre les générations est considérable du point de vue de la technologie. Les adolescents d’aujourd’hui sont pratiquement nés avec un ordinateur dans les mains ; ils ont totalement intégré l’informatique et les jeux vidéo dans leur vie. Auparavant, les parents voyaient leurs enfants utiliser les jeux de leur propre enfance, ils étaient donc, en quelque sorte, en terrain connu. Ils comprenaient l’intérêt et le fonctionnement de ces loisirs, ce qui n’est plus du tout le cas aujourd’hui.
Le bénéfice caché
Les jeux vidéo ont tout de même un avantage pour les parents : leur fils reste à la maison ! Et oui, il faut bien le reconnaître, tant qu’il joue, il n’est pas dehors à traîner, à prendre des risques ou à faire des âneries…
En cela, ils sont donc très sécurisants pour les parents : comme lorsqu’ils étaient petits, ils gardent un œil sur eux.
La tentation est donc grande, notamment pour les mères, d’approuver, voire d’encourager ces pratiques.
Bien entendu, les adolescents sont tout à fait conscients de cet atout et n’hésitent pas à en "jouer" (le terme est particulièrement approprié) pour se défendre lorsque les parents tentent de limiter le temps de jeu.
Comment réagir
Pour les parents, toute la problématique est de restreindre les enfants alors qu’ils prennent du plaisir, de poser un cadre et des limites, mais sans maîtriser ce cadre.
La première réaction à avoir est donc de s’intéresser au jeu sur lequel l’enfant passe des heures. Il s’agit de lui montrer que ses loisirs sont importants à vos yeux : demandez-lui par exemple, de vous expliquer comment cela fonctionne, vous serez quelquefois agréablement surpris, et surtout, vous serez en mesure de comprendre votre enfant et de communiquer avec lui.
Il arrive souvent que les adolescents veuillent rencontrer leurs compagnons de jeux. Et c’est tant mieux, car cela prouve que les jeux vidéo créent aussi des liens sociaux ! Un rendez-vous, c’est l’assurance de quelques heures passées sans jouer, la preuve que votre enfant a toujours des intérêts pour la vie réelle.
Enfin, même s’il faut rester vigilant sur les temps d'utilisation, il faut aussi relativiser : les jeux vidéo n’échappent pas à la crise d’adolescence…