Difficulté de lecture : 2 / 5
L’explosion des banlieues et ses conséquences positives
En 2005, les banlieues françaises s’enflammèrent. Les émeutes touchèrent plus de 300 villes, 6600 voitures furent brûlées, près de 1800 personnes mises en garde à vue. 11 500 policiers et gendarmes furent déployés.
Petite réflexion sur les statistiques
En matière de délinquance, comme dans le secteur économique ou médical, nous sommes abreuvés de chiffres : nombre d’interpellations, de vols avec violence, de cambriolages pour le premier, pourcentage de français touchés par la précarité ou le chômage pour le second, ou encore nombre d’incidents médicaux, de malades du sida ou du cancer pour le dernier.
A bien y regarder, on remarque une similitude : ils désignent tous, sans exception, des phénomènes négatifs. Pourquoi ? Plusieurs réponses semblent possibles : la première serait de considérer qu’aucun évènement ‘positif’ ne se produit dans les trois domaines cités. Or, même si l’on est d’un pessimisme forcené, nous avons peine à le croire.
Si des actes favorables existent, alors pourquoi ne pas en parler ? Là encore, deux réponses s’offrent à nous : soit notre société est masochiste, soit l’information est instrumentalisée de sorte que nous pensions que tout va mal dans notre pays. Si chacun se fera sa propre opinion, nous allons tenter, en ce qui nous concerne, de nous interroger sur les conséquences positives de l’explosion des banlieues : les révoltes ont-elles eu une utilité sociale et publique ?
Un phénomène médiatique
La plupart des français a pris connaissance des émeutes au travers des journaux télévisés qui firent leurs gros titres sur ces évènements. Si aucune rédaction ne les traitèrent comme des faits mineurs étant donnée le degré de violences, toutes ne les considèrent pas comme le reflet de questions sociales majeures.
L’étude du traitement médiatique semble être un moyen pertinent pour évaluer les conséquences des émeutes. Lors des évènements de 1968, les manifestations avaient révélé une profonde crise dans notre pays, elles furent relayées par les journalistes qui s’interrogèrent sur l’origine du mécontentement et participèrent à la médiatisation des mouvements sociaux qui se formèrent pour apporter des solutions : la rupture, traduite par une explosion, ouvrit un dialogue.
Les émeutes de 2005 furent, à l’inverse, totalement muettes, en ce sens qu’elles ne débouchèrent sur aucun débat réel entre les pouvoirs publics et les habitants des banlieues. Par ailleurs, l’indifférence de la plupart des français fut telle qu’aucune sanction politique n’atteignit le Ministre de l’intérieur de l’époque qui devînt Président de la République par la suite.
Quelques conséquences positives
Nous pourrions citer la réaffirmation du principe de discrimination positive et les quelques embauches de français issus de l’immigration à des postes à responsabilité, tel Harry Rozelmack, afin de donner aux jeunes de banlieues des modèles à suivre ainsi que l’espoir de réussir.
Nous pourrions également parler de la prise de conscience des conditions de vie déplorables subies par les habitants des banlieues et rappeler que les acteurs de la religion musulmane n’ont, à aucun moment, tenté de s’approprier le mouvement de colère, qui évolua sans aucune connotation religieuse.
Au niveau international enfin, il nous semble intéressant de citer l’initiative du nouvel ambassadeur américain Charles Rivkin qui déclara aux jeunes des banlieues lors d’une visite en avril dernier: « Chez moi, c’est différent. Tu peux être africain, indien, mais tu es avant tout américain. […] J’aime parler avec tous les Français. Je sais, et je suis sûr, que le prochain leader français est en banlieue ». Depuis, il entreprit la construction d’un réseau afin d’identifier les ‘figures’ des banlieues.
Finalement, au regard de la pauvreté des mesures prises par notre gouvernement et des moyens alloués à la lutte contre les difficultés grandissantes des habitants de banlieue, nous pouvons regretter qu’ils ne disposent pas, en effet, d’un représentant capable de porter leurs opinions sur la scène publique et politique. Ne serait-ce pas là, le meilleur moyen d’intégrer ces problématiques aux questions sociétales ? D’ailleurs, ne serait-ce pas le fondement même du principe démocratique que de permettre à chaque groupe social de s’exprimer ?