Difficulté de lecture : 3 / 5
France, Europe et racisme
Face à la dénonciation d’une dérive raciste en France par l’ONU cet été, l’histoire du pays des Droits de l’Homme semble bien lointaine.
Naissance du racisme en Europe
Le mot ‘race’ apparaît au 15ème siècle, il se développe à compter du 17ème siècle et de la découverte des nouveaux continents qui marque la rencontre avec un ‘Autre’ qui ne ressemble pas au modèle occidental. La fièvre ‘scientifique’ de l’époque conduit alors les colons à présenter leurs découvertes au travers de cartographies, les plantes comme les ‘indigènes’ pour démontrer, de retour sur le continent européen, la réussite de leur exploration.
Le 18ème siècle marque un tournant en ‘théorisant’ cette présentation de l’Autre : anthropologues, médecins et autres savants tentent en effet d’expliquer les origines des différences. L’une des plus célèbres, et non moins terrible théorie, fut celle du Pape Valladolid qui décréta que les Indiens avaient une âme, alors que les Noirs n’en avaient pas, celant ainsi le destin d’esclavage de plus de 50 millions d’hommes et de femmes.
Les savants débutèrent ainsi leur travail de hiérarchisation des races, plaçant bien évidemment les occidentaux au sommet de l’évolution humaine et définissant les Noirs par la couleur de leur peau. Le code noir institua cet état de fait en proclamant par exemple que le Noir était un bien meuble.
Du racisme populaire au racisme inconscient
Au cours du 19ème siècle, la société organise la rencontre du peuple avec cet Autre en ramenant des indigènes sur le continent et en organisant des présentations ‘dans son cadre naturel’, comme nous le faisons aujourd’hui avec des animaux. Ces derniers étaient donc conduits au zoo, où les occidentaux se pressaient pour les voir : c’est ainsi environ 750 millions de visiteurs qui vinrent, avec leurs enfants, admirer à peu près 30 000 exhibés sur 60 ans d’histoire.
Au-delà du caractère si dérangeant de cette période, nous comprenons comment le racisme entra inconsciemment dans l’imaginaire collectif et individuel de chaque enfant, subjugué par une présentation de l’Autre qui se voulait inférieur et sauvage. Le racisme, en tant qu’idéologie, ne se propage donc pas toujours de façon violente mais peut résulter d’une fabrication de notre regard sur l’autre et nous transformer en raciste sans que nous en ayons conscience.
Et aujourd’hui ?
Comment nier la présence du racisme dans notre pays lorsqu’on démontre que les jeunes français d’origine maghrébine ont 3 fois plus de difficultés à trouver un emploi ou encore 4 fois moins de possibilités de trouver un logement… Ces réalités son désormais connues de tous. En revanche, peu d’entre nous ont conscience, et pour cause, des phénomènes de racisme inconscient.
Inconscient, le terme semble en effet pertinent si l’on se réfère au fondateur de sa science, Freud, qui fit du langage (encore plus chez Lacan) sa voie d’accès. Le racisme inconscient se structure en effet dans le langage. Il prend la forme de ‘blague’ lancée innocemment telle que « c’est facile, vous avez le rythme dans la peau » ou encore « vous êtes naturellement musclés » etc… autant de spécificités que l’on attribue à l’autre sur des critères physiques et non intellectuels et qui constituent un déni de la capacité de l’Autre à raisonner.