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Codes et coutumes de la bourgeoisie française
En France, tous les habitants bénéficient d’une égalité de droit. Cela implique, entre autres, qu’aucun groupe social n’est censé détenir plus de pouvoirs ou d’avantages qu’un autre.
Retour sur le pouvoir aristocrate
La Révolution Française a mis fin aux privilèges et a permis l’égalité civile et politique, malheureusement elle n’aboutit pas à l’égalité sociale. A la caste des nobles, balayée par le peuple, succéda une aristocratie qui s’installa presque immédiatement sur les ruines de leurs prédécesseurs.
Il est vrai que les nobles, ‘en échange’ de leurs privilèges se devaient d’assurer un certain nombre de devoirs tels que la gestion des productions agricoles, des fonctions militaires, policières et juridiques. Mais le plus grand de leurs privilèges étaient sans aucun doute, celui du prestige, c'est-à-dire d’être assimilés à une représentation de supériorité socialement partagée.
De cette représentation naquirent les expressions de ‘classes dirigeantes’ ou encore ‘d’autorités sociales’, signifiants d’une capacité à réguler et conduire la communauté, tant sur le plan intellectuel, économique, politique que social.
Qui sont les bourgeois ?
Alors qu’elle ne dispose d’aucune existence légale ou juridique, la classe des bourgeois n’en est pas moins une réalité sociale qui marque toujours l’inconscient collectif. Rappelons en effet les slogans « président et ami des riches » ou encore la chanson « les bobos » de Renaud. Comment cette démarcation sociale est-elle parvenue à se maintenir malgré le nivellement des connaissances culturelles et des ressources financières ?
Il est bien évident que cette frontière ne se fonde sur aucun jugement empirique raisonné : d’ailleurs sur quels éléments pourrait-elle se construire ? Les bourgeois s’appuient donc sur l’apparence et l’image pour affirmer leur différence vis-à-vis des ‘non-bourgeois’. Or, rien n’est plus remarquable que la richesse, visible dans le choix des vêtements, des bijoux, de la voiture, ainsi qu’au travers de l’attitude et de la gestuelle.
Dos bien droit, vêtements cintrés, tête haute, habitation dans des quartiers cossus, inscription des enfants dans des écoles privées élitistes ou encore logement dans des maisons dites ‘bourgeoises’, toutes ces habitudes de vie ont pour fonction de donner à voir son appartenance à la bourgeoisie.
S’il est certain qu’une certaine richesse est nécessaire à l’acquisition de ces faire-valoir, elle est moins centrale que la manière de l’utiliser. Ce mode de vie crée d’ailleurs un certain nombre d’incohérences et de contradictions : un bourgeois consacrera moins d’argent à l’achat de nourriture, mais veillera à ce que le repas se déroule dans le respect d’un certain nombre de rituels établis : tenue de table impeccable, service etc…
Bourgeois et travail
Tout comme l’essentiel, au niveau financier, porte sur la façon dont on emploie son argent, l’important, au niveau professionnel, consiste en la manière de ‘s’utiliser’ soi-même. Cela implique, d’ores et déjà, de ne pas être ‘utilisé’ par un autre que soi : les femmes utilisent bien volontiers leurs savoirs en matière de couture et autres tricots pour réaliser des décorations, leurs robes ou leurs chapeaux mais ne raccommoderaient jamais les chaussettes de leur famille, ce serait ‘s’utiliser’ pour eux.
De même, les hommes ne peuvent imaginer exercer un métier manuel, car le seul fait d’exploiter son corps d’une façon physique, semble indécent. Sont interdits également toutes les professions salissantes lesquelles, dans tous les sens du terme, entacheraient l’image du bourgeois. De ces lois internes implicites découlent une orientation privilégiée vers les professions d’encadrement et de direction, de gestion, de droit ou encore de politique, c'est-à-dire celles dans lesquelles les fonctions consistent à ‘utiliser’ autrui.