L’impression d’être « de trop » : d’où vient ce sentiment d’illégitimité ?

Il y a des moments où l’on se sent comme un corps en trop dans une pièce, un mot de trop dans une conversation, une présence gênante dans un espace qui semble ne pas nous attendre. Ce sentiment d’être « de trop », pas tout à fait à sa place, pas vraiment le bienvenu, peut être diffus, ponctuel… ou profondément ancré. Il touche à la légitimité, au droit d’être là, de prendre de la place, d’exister sans se justifier. Mais d’où vient ce malaise intime ? Et comment le comprendre pour s’en libérer, peu à peu ?
Un ressenti souvent enraciné dans l’enfance
L’impression d’être « de trop » ne naît pas du hasard. Elle trouve souvent ses racines dans les premières expériences relationnelles. Un enfant qui grandit dans un environnement où il ne se sent pas vraiment écouté, valorisé ou attendu peut intégrer l’idée qu’il dérange, qu’il faut qu’il se fasse petit pour ne pas gêner. Cette croyance s’installe dans le corps, dans les silences, dans les hésitations… et se prolonge bien souvent dans la vie adulte, même si le contexte a changé.
Une société qui valorise la performance et la visibilité
Dans un monde qui met en avant la réussite, l’assurance, la prise de parole, l’impact, il est facile de se sentir illégitime quand on doute, quand on avance à tâtons, quand on ne correspond pas aux codes dominants. Le sentiment d’être de trop peut alors être renforcé par un modèle social qui laisse peu de place aux nuances, à la lenteur, à l’invisible. On se demande si l’on est à la hauteur, si l’on a le droit de parler, de demander, d’exister sans avoir à prouver constamment sa valeur.
Quand on intériorise le regard des autres
Le sentiment d’illégitimité est souvent moins une réalité objective qu’un ressenti intérieur hérité de regards extérieurs. On a pu nous faire comprendre, à mots couverts ou de manière frontale, qu’on était « trop » ceci, « pas assez » cela. À force, on finit par s’auto-censurer, se retirer, se convaincre qu’il vaut mieux ne pas prendre de place. Le problème, c’est que ce retrait nourrit la sensation d’être « à côté », et renforce encore plus la croyance initiale.
Reconquérir doucement sa place
Sortir de ce sentiment ne se fait pas en un claquement de doigts. Cela commence souvent par reconnaître qu’il s’agit d’un ressenti ancien, pas d’une vérité actuelle. C’est oser prendre la parole, même si la voix tremble. C’est accepter d’être visible, un peu, sans s’excuser. Et surtout, c’est se rappeler que la légitimité ne se gagne pas : elle se reconnaît. Nous n’avons pas à mériter notre place dans le monde. Nous avons à nous l’accorder, jour après jour, avec douceur et persévérance.